Rendez-vous à l’hôtel Kergolay-Langsdorf
Petit bijou architectural du XVIe arrondissement l’on retrouve l’hôtel Kergolay-Langsdorf après Parabellum, la première pièce de l’autrice : on avait adoré, alors on attend avec impatience de pouvoir monter les escaliers de bois pour découvrir l’histoire d’une famille bourgeoise déchirée par de sombres histoires d’héritage, de propriété, d’affinités factices et d’inimitiés révélées…
Retour dans les 50’s
Ici, pas de téléphones : ils n’existent pas en 1950, et quel bonheur de voir un public concentré sur ce qu’ils ont autour d’eux et pas sur leur petit écran ! Merci à cinquième acte de le rappeler : une immersion ne se filme pas, elle se vit.
On nous avertit d’autre chose : ici, le spectateur est fantôme. Pas de masque blanc, mais l’effet est exactement le même : impossible de parler aux comediens qui nous traversent comme si nous n’existions pas, ici, c’est la narration qui prime… Et quelle narration !
Un scénario très lourd, ponctué de révélations morbides se déroule sous nos yeux avec une touche d’humour noir tout à fait jouissive : les personnages névrosés, tantôt vils et cruels, tantôt brisés et désespérés, se livrent une guerre d’héritage sans merci dans une mise en scène millimétrée et très esthétique. Tout est très beau, les costumes, coiffures, accessoires aux petits oignons, et les passages d’une pièce à l’autre parfaitement calibrés pour faire interagir les différentes scènes simultanées ensemble.
On décide de suivre un personnage, de s’engouffrer dans une pièce ou d’écouter aux portes : une seule règle : il faut courir pour entrer avant que les portes ne se referment, et tout va de plus en plus vite ! On tente de comprendre une histoire complexe, mais bien ficelées, à travers les points de vue de personnages aux intérêts distincts prêts à tout pour parvenir à leurs fins : le spectateur se place en voyeur, petite souris qui observe sans sourciller les allées-venue des acteurs, tentant de recomposer le puzzle familial sur deux étages, un escalier et une cave…
L’avis de romane
On aime les finitions parfaites de cette pièce rondement menée, la beauté de l’environnement et l’équilibre d’une écriture finement maîtrisée, on n’en dira pas plus : il faut y aller pour découvrir les mystères de cette future maison de couture et apprécier le jeu brillant des comédiens et la mise en scène impeccable des mastodontes du polar immersif .
Conclusion
Avec le récit théâtral déambulatoire à trois-cent-soixante degrés d’une histoire admirablement écrite, le collectif cinquième acte fait ce qu’il sait faire de mieux dans le style qui lui est propre : c’est la signature jouissivement grinçante d’une main de maître, celle de Nathalie Rémy et de Jean Patrick Gauthier. On a déjà hâte d’y retourner pour comprendre les morceaux de l’histoire qui nous ont échappé !